Laissez bronzer les cadavres !, le troisième film du duo formé par Bruno Forzani et Hélène Cattet, a été projeté en grande primeur sur la resplendissante Piazza Grande lors de la 70e occurrence du Locarno Festival (notre critique du film est à lire ici). L’équipe de Film Exposure en a profité pour s’assoir un moment avec les deux cinéastes afin de parler avec eux de leur adaptation de Manchette ainsi que de leur méthode de travail extrêmement précise. Une discussion conviviale, passionnée, durant laquelle le couple affichait une belle complicité. Et au passage, un scoop concernant leur réjouissant prochain projet nous a été révélé…


Comment s’est fait la rencontre avec le livre Laissez bronzer les cadavres ! de Jean-Patrick Manchette et comment est né l’idée de cette adaptation ?

Hélène Cattet : C’est moi qui suis tombée dessus. Je travaillais dans une librairie il y a environ une dizaine d’années, et il y avait l’intégrale Manchette qui était parue à cette époque là. C’est donc comme ça que je l’ai découvert. C’est la première nouvelle que j’ai lue et j’ai dit à Bruno : « C’est incroyable ce truc ! Tu vas voir, ça va t’être familier. » Franchement, les adaptations ne m’intéressent vraiment pas, je ne vois pas l’intérêt. Mais là je lui ai dit que c’était la première fois que j’ai pensé qu’on pourrait faire une adaptation, parce que j’avais l’impression qu’on y avait notre place. J’ai dit : « Tu verras, tu vas avoir des images qui vont apparaître, de westerns et de polars italiens des années 1970 ». Bref, Bruno l’a lue et est tombé d’accord. Du coup on s’est dit que si un jour on faisait une adaptation ce serait celle-là. Et puis et bien… ça s’est produit (rire). Le hasard a fait que finalement, de fil en aiguille, c’est arrivé dans les discussions avec François [Cognard, producteur du duo depuis Amer – ndlr] qui nous a dit qu’il connaissait l’ayant-droit de Manchette.

Bruno Forzani : En fait, l’histoire avec François remonte au moment où on sortait Amer en DVD. On va chez le distributeur français et François rencontre un gars, discute avec lui et il parle de Laissez bronzer les cadavres! comme d’un livre inadaptable au cinéma. On est donc allé voir François en lui disant : « C’est bizarre que tu aies dit ça parce que nous, s’il y a bien un livre et un seul qu’on pourrait adapter c’est Laissez bronzer les cadavres! » (rire général). Je ne me souviens plus pourquoi il considérait le livre comme inadaptable mais ça s’est fait comme ça et cette discussion nous est toujours restée en tête, avec cette idée que le projet était peut-être infaisable. Ensuite, dans le processus d’adaptation, on a eu plein de problèmes et on pensait que c’était un projet maudit. On essayait de ne pas être superstitieux en se disant que ça allait aller mais on a vraiment eu beaucoup de problèmes ; déjà pour trouver le décor, ensuite, à un mois du début du tournage il s’est avéré que la maison qui allait nous servir était hyper dangereuse et qu’on ne pouvait pas entrer dedans, donc tout s’effondrait par rapport au découpage, j’ai eu plein d’accidents et on s’est dit : « Putain ! En fait on est dans la merde, c’est un film maudit, on aurait jamais dû le faire ! » Finalement on a réussi mais cette histoire nous a un peu suivi.

HC : On avait vraiment une espèce d’épée de Damoclès au dessus de la tête ouais… Avec la quinzaine d’accidents sur le tournage (rire).

Votre adaptation du livre semble assez fidèle, vous avez notamment gardé la structure chapitrée et rythmée par le temps qui s’écoule. Comment vous y êtes-vous pris pour parvenir à injecter votre personnalité dans le projet ? À quel point avez-vous dû déconstruire la narration du livre pour en arriver à ce résultat ?

HC : Il y a un gros travail, on a tout reconstruit et en même temps on est absolument fidèle à l’ensemble du bouquin.

BF : Dans le livre, cette narration avec les panneaux horaires est présente du début à la fin. Nous on l’a cassée à un moment donné pour aller vers autre chose, quelque chose de plus fantastique et onirique, pour donner une autre…

HC : … dimension à l’histoire.

BF : Oui voilà, et donc du coup on a cassé le côté « narratif – panneaux. »

HC : Oui, c’était pour essayer d’avoir un autre point de vue sur cette fusillade et de plus basculer dans la subjectivité de Luce, l’artiste. C’est ça qui nous avait beaucoup intéressé à la base, cette construction avec les panneaux horaires, les retours en arrière, en avant tout en pouvant ensuite s’en affranchir.

Votre travail de mise en scène est vraiment incroyable. Est-ce que vous pouvez revenir sur votre processus de création ? Est-ce que tout est prévu à l’avance, storyboardé ou laissez-vous une place à l’improvisation ?

HC : Le but c’est d’arriver sur le tournage en sachant tout, en ayant tout bien déterminé. Déjà parce que ce n’est pas un gros budget, parce que les conditions de tournage sont compliquées, le décor était vraiment très compliqué.

BF : Ce n’était pas accessible en voiture, on ne pouvait y aller qu’à pied.

HC : Le matin on devait monter une colline pendant une demi heure pour y accéder, et on descendait le soir. Il fallait donc vraiment être très bien organisé car il n’y avait pas de logistique là-bas [le tournage a eu lieu en Corse – ndlr].

BF : Ça c’est pour le côté pratique. Mais après il y a le côté théorique, parce que le découpage, le montage et le son, c’est vraiment sur ça que repose notre manière de raconter l’histoire. On y pense en amont pour être le plus cohérent possible par rapport à ce qu’on va raconter. Il y a donc un côté économique et un côté artistique.

Imaginons que vous bénéficiez un jour d’un budget astronomique, pensez-vous que ça changerait votre manière de travailler ?

HC : Je ne pense pas, parce qu’on a appris comme ça. Comme on s’est formé par nos courts-métrages où on s’autoproduisait, on était hyper conscient du budget, de ce qu’on était capable de faire, ou pas, et on préparait tout de la même manière. Tout était bien storyboardé, on se filmait, on essayait le montage, le rythme, etc.

BF : Le fait de préparer en amont te permet d’avoir toute une réflexion sur comment tu vas faire le film. Du coup, la mise en scène n’est pas un ornement mais devient vraiment un langage. La mise en scène n’est pas là pour rendre les choses belles, elle raconte quelque chose. Ce processus prend des mois des mois et des mois et c’est grâce à ça qu’on arrive à un résultat, qu’on peut peut-être qualifier d’organique.

HC : Oui, parce que tous les éléments ont été pensés dès le départ. À l’étape du scénario déjà, pratiquement tous les éléments sont marqués ; les musiques, le cadre, la lumière, la rapidité du montage, tout est déjà pris en compte dès l’écriture.

BF : Je pense que si on improvise, bon… je n’arrive même pas à imaginer ça (rire général) mais admettons, je pense qu’on aurait pas la même précision par rapport à ce qu’on veut dire, ce qu’on veut raconter et faire ressentir.

HC : C’est comme si tu écrivais un bouquin et qu’on te demandait d’un coup : « Bon ben vas-y, crée-moi ton bouquin comme ça ! ». Ce ne serait pas possible.

Est-ce qu’il arrive que cette démarche crée des frustrations chez vos collaborateurs ?

BF : Avant oui, maintenant non.

HC : C’est-à-dire que maintenant on travaille toujours avec les mêmes personnes. C’est vrai que pour des nouvelles personnes c’est un peu compliqué de rentrer dans l’ambiance (rire). On travaille toujours avec le même noyau, avec les mêmes producteurs, le même chef-op, le même monteur…

BF : C’est vrai qu’au début, comme on est tout le temps là, les premières personnes avec qui on travaille elles ont eu l’impression d’être des pousse-boutons, de ne pas donner leur sensibilité. En gardant nos collaborateurs à chaque fois, au fur et à mesure ils trouvent leur place.

HC : L’idée c’est justement de canaliser leur savoir-faire sur un truc précis. Et c’est un peu pareil avec les comédiens. Ils peuvent être frustrés ; c’est vrai qu’il y a certains comédiens qui ne supporteraient pas notre méthode de travail, avec un cadre très précis. C’est à l’intérieur de ce cadre-là qu’ils doivent s’épanouir. Ce sera pas la caméra qui va commencer à aller les chercher, ou la lumière qui sera adaptée.

BF : Pour Laissez Bronzer, où il y avait plus de comédiens, on a pas rencontré de problèmes. Comme on a fait deux films avant, peut-être qu’il y a une sorte de confiance.

HC : Et puis il y a une équipe soudée, ce qui fait les comédiens sont tout de suite hyper en confiance. C’était un peu comme une grande colonie de vacances (rire).

Comment vous expliquez que c’est dans cette recherche extrême de précision, du détail, que vous arrivez à vous affirmer. Ne vous sentez-vous jamais étouffé par cette volonté de créer quelque chose d’ultra précis?

HC : Étouffés non parce qu’on imagine ça vraiment comme un puzzle, avec des pièces qu’on met les unes à côté des autres. Comme un jeu de domino. Et le problème, c’est que si jamais on rate un plan, ça fout en l’air toute une séquence. On le sait et c’est rassurant pour nous, parce que comme c’est vraiment comme ça qu’on construit nos phrases, chaque plan qu’on fait on sait…

BF : C’est rassurant, putain, parce que justement s’il te manque une pièce, t’es vraiment dans la merde (rire).

HC : On a un grand nombre de plans à faire par jour, et ce qui est rassurant c’est qu’on sait pourquoi chaque plan est là. Donc quand on le fait, on sait la place qu’il a au sein du film. Après s’il est foiré… c’est clair que c’est pas rassurant.

BF : Comme on imagine le film dans notre tête, on fait tout pour qu’il y ressemble. Donc c’est pas étouffant non, au contraire, c’est du travail, de la persistance pour arriver au résultat que tu fantasmes.

Et le travail en amont est donc colossal ?

BF: Pff… c’est énorme.

Comment travaillez-vous à deux ? Vous répartissez-vous certaines tâches ?

HC : Non.

BF : Pour L’Étrange Couleur, on s’était réparti quelques bribes du film, mais celui-là on l’a vraiment travaillé en commun pour ne pas…

HC : … avoir de frustration.

BF : Ouais, parce que tu vois quand tu t’imagines une séquence, pour toi elle est juste, et pour l’autre c’est autre chose. Donc on a vraiment fait tout le découpage ensemble, à 100%, pour être…

HC : … sur la même longueur d’onde.

BF : Ouais, pour ne pas avoir des points de vue trop radicalement différents.

HC: Mais donc c’est comme ça pour tout : on ne fait rien chacun dans notre coin, on le fait ensemble sinon ça pète (rire).

Pouvez-vous revenir sur la dimension onirique évoquée un peu plus tôt ? Aviez-vous des références en tête ? Comment avez-vous abordé la création purement esthétique de ces séquences ?

BF : Le truc c’est que dans le bouquin le personnage de Luce est plutôt secondaire et nous on en a fait le  personnage principal. C’est grâce à elle que peut décoller toute l’action et c’est elle qui permet d’enlever le côté un peu terre-à-terre, la fusillade devient comme ça une sorte de happening. En fait dans le bouquin, elle est décrite un peu comme Niki de Saint Phalle, tirant sur les tableaux et tout ça, du coup ça nous a fait penser au mouvement artistique du nouveau réalisme, avec Klein et Tinguely. C’était des trucs de performance liés à la destruction, ils cassaient des bagnoles, ce qui va bien avec le côté « film d’action », ils tiraient sur des Christ ; il y avait tous les cassages des tabous sexuels, religieux, etc. Du coup on s’est vraiment emparé de cet aspect là de Luce qu’il y avait dans le livre pour après faire décoller le film ailleurs.

HC : Ouais.

BF : Après, on était allé à la Biennale de Venise où on avait vu une oeuvre d’un collectif vietnamien avec des balles qui entrent dans du gel balistique. Ça nous a inspiré pour la manière de tuer un des personnages.

Est-ce que vous avez été tentés de réduire davantage la narration dans le film pour basculer encore plus dans l’onirisme ?

HC : Non.

BF : Non, le truc c’est qu’on adorait vraiment le livre et on voulait en être respectueux et puis vers la fin, voilà, on partait…

HC : … vers autre chose mais c’est vrai qu’on était assez fidèle parce qu’on le trouvait déjà super bien.

Et c’est des passages sur lesquels vous aimez travailler ? Les passages narratifs je veux dire.

BF : Bah là c’était…

HC : Là ça allait, c’était amusant.

BF : Ouais, dans le cadre de ce film-là… (rire) Bah disons que moi j’avais des appréhensions puisque c’est une narration qui est complètement différente de L’Étrange couleur. Et pour L’Étrange couleur, en termes de narration, moi j’étais content de cette recherche de poupées gigognes, une narration un peu à la Satoshi Kon. Après, passer à quelque chose qui était beaucoup plus linéaire et à un autre type de narration, ça m’a fait un peu flipper parce que on était vraiment avec Amer, L’Étrange couleur et les courts-métrages, dans une recherche d’un certain type de narration et là on passait complètement à autre chose. Du coup personnellement, au début ça m’a un peu fait flipper puis, quand on a commencé à travailler le scénario, l’adaptation, c’était tellement jouissif à faire que c’est allé (rire).

Vous parlez de vos premiers films et de vos premiers courts qui étaient plus orientés vers le giallo, là on reste toujours dans le cinéma italien avec le poliziesco et le western spaghetti, comment avez-vous opéré ce changement de genre ?

HC : Ça c’est vraiment avec le livre, qui est vraiment entre le western et le polar. Donc c’est venu avec le livre et avec ce truc où en lisant c’est ça qui nous était apparu et de toutes façons c’était un peu notre rêve quand même… On avait vachement envie de faire un western (rire).

BF : Ouais parce que le giallo et le western c’est vraiment des genres de mise en scène. Surement parce que d’un côté tu as Dario Argento et de l’autre Sergio Leone qui sont des grands réalisateurs mais du coup c’est vraiment deux genres qui sont liés purement à la mise en scène et ça nous disait donc à fond.

HC : Ah ouais on avait vraiment envie ! C’était l’occasion.

Est-ce que vous aviez éventuellement des références précises en tête quand vous avez travaillé sur ce troisième film ? Ou est-ce plutôt le fruit d’un amas de choses que vous aimez et qui vous ont imprégnés ?

HC : Il y a les westerns qu’on aime, qu’on a regardés et regardés… Après, est-ce qu’ils nous inspirent ? C’est vrai qu’il y a Keoma qui est quand même vachement bien et qu’on avait peut-être en tête mais bon c’est différent (rire).

BF : C’est plutôt un amas comme tu dis. En fait, les références, à la limite, elles nous servaient de contre-références. Tu vois, on a regardé les duels de Sergio Leone pour ne pas faire la même chose, ils sont tellement géniaux que c’est complètement con de singer ça. Et quand on travaillait sur les séquences d’action, les fusillades, on avait jamais fait ça, on voulait pas tomber dans du John Woo ou The Raid 2 que j’adore mais c’est un autre type de violence. On voulait essayer de rester le plus fidèle à nous-mêmes et donc d’aborder ces séquences-là par le montage, les choix radicaux au niveau du cadre. Pour les armes à feu par exemple, on avait un peu Bullet Ballet de Tsukamoto, c’était une référence mais finalement elle n’y est pas vraiment, excepté pour ce côté fétichiste de l’utilisation de l’arme à feu et pour l’aspect organique. Il y a aussi ce film que j’aime beaucoup Quelli che contano d’Andrea Bianchi qui est un poliziesco avec Henry Silva. Ca se passe en Sicile, il y a ce mélange du poliziesco-western avec le côté aride et méditerranéen de la Sicile, et pas du tout le côté urbain du poliziesco. Mais après c’est pas vraiment des références, c’est des choses auxquels on pensait…

HC : Ouais, c’était quelque part mais pas vraiment concrètement.

BF : Quand on a lu le livre, ça m’a fait beaucoup penser à Cani arrabbiati de Mario Bava, surtout le début parce qu’après c’est complètement autre chose. La seule référence c’était vraiment le bouquin, en fait. Il est très visuel, y’avait déjà plein d’idées de lumière qu’on a approfondies par rapport au travail qu’on avait fait sur Amer et L’Etrange couleur, notamment sur les nuits. Le bouquin propose quasiment déjà un découpage.

Tu parles de Bullet Ballet, mais Laissez bronzer évoque aussi un autre film de Tsukamoto, Tokyo Fist, avec son rapport à la chair, avec ces carcasses de porc, ces lambeaux de chair qui se déchirent…

HC : Là, c’est dans le livre.

BF : Euh… non.

HC : La carcasse ?

BF : Elle est légèrement évoquée… (rire)

HC : Oui bien sûr, mais y’a plein d’éléments dans le livre qui sont juste évoqués, en une phrase ou un mot, des choses qu’on a finalement développées dans le livre.

BF : Dans le film.

HC : Ah ouais, pardon. (rire)

BF : Non mais par rapport à Bullet Ballet c’est plus par rapport au travail sur le son, on a vraiment essayé de travailler les coups de feu. Il y a ce moment dans Bullet Ballet où t’as un flingue qui tire et t’as une grosse explosion. Pour le travail sur le son, on a utilisé des canons et différents types de coups de feu et différentes valeurs de plan. On a essayé de trouver un mélange qui te booste.

HC : Comme on tourne sans le son, ça permet pour chaque son de mélanger plein de sonorités, pour que ça ait un impact particulier sur la subjectivité du spectateur.

BF : Et qu’il y ait un impact physique, que les coups de feu soient… pfff

On l’a bien ressenti hier soir sur la Piazza Grande en tout cas ! (rire)

J’ai l’impression que dans le film il y a un discours méta, notamment avec les photos aériennes avec les fourmis dessus. Elles donnent l’impression qu’il y a une forme de recul par rapport au lieu, par rapport au film lui-même. Est-ce que ces photos avaient une fonction précise ?

HC : Bah, ouais, c’est exactement pour ça. C’est pour avoir ce recul à ce moment-là du récit, pour pouvoir passer ensuite dans le point de vue de l’artiste, Luce, qui regarde cette déferlante de violence avec un œil de créatrice de happenings.

BF : Comme si c’était… sa dernière œuvre d’art… (rire)

J’avais l’impression que ça asseyait le film comme une œuvre contemporaine…

HC : Oui, vraiment, le but c’était de transformer cette fusillade, la faire glisser vers le happening. Vers la dernière performance de cette artiste.

BF : Personnellement, je ne pense pas que j’aurais pu faire le film si ç’avait été un truc terre-à-terre de A à Z. Je pense pas que ça m’aurait intéressé. Ce personnage nous a vraiment permis de le coller à autre chose…

HC : … et de donner une autre vision de l’action. Un autre point de vue dessus.

Ce qui donne un film quand même très radical… le film ayant été projeté sur la Piazza, qui propose habituellement des films plus accessibles par un grand public, aviez-vous éventuellement quelques craintes par rapport à la réaction du public?

HC : Honnêtement, on a pas trop réfléchi. En tout cas cette fois-ci. D’habitude je suis très stressée, cette fois-ci j’ai vraiment réussi à lâcher prise, j’ai pas du tout anticipé. Je me suis dit: “On se détend et on verra bien !” (rire). C’est juste avant de monter sur scène que j’ai commencé à me dire “oh là là là là”. Mais on s’est laissé aller sans se prendre la tête.

BF : C’est la première fois qu’on venait sur la Piazza Grande, donc je ne savais pas que c’était plus grand public. On était content de regarder le film, quasiment tout devant, donc a pas vraiment vu… L’écran était tellement grand, le son était tellement à fond… On redécouvrait notre film.

HC : On s’est vraiment pas posé de questions.

BF : Franchement, à chaque fois qu’on regarde le film avec le public pour la première fois, on est toujours déçu. Parce que c’est tellement de travail, et tout d’un coup “pouf”.

Mais qu’est-ce qui vous déçoit ? Le résultat, la réaction du public ?

HC : Non, c’est juste que c’est un moment d’adieu.

BF : Il y a un côté déceptif…

HC : C’est le moment où tu dis au revoir au film. Tu le donnes. C’est un moment d’adieu.

BF : Non mais là, c’était génial ! (rire)

Pour Laissez bronzer, c’était peut-être un peu dicté par le roman, mais est-ce que pour un prochain projet il y aurait un genre en particulier dans lequel vous aimeriez vous immerger ? Comme vous avez cité plusieurs fois le cinéma japonais, est-ce que vous auriez envie d’explorer un autre pan du cinéma ?

HC : Il y a des fuites, c’est pas possible.

BF : Putain y’a des fuites ! (rire)

Ah non, vraiment pas !

HC : Ah si si si, toi tu sais quelque chose !

Pas du tout ! Vous avez cité Satoshi Kon, Shinya Tsukamoto… et comme c’est un cinéma que j’affectionne, j’étais curieux.

BF : Ah…

HC : Le Canada a fuité ! (rire)

Bon, du coup je ne sais pas si vous avez le droit d’en parler… mais en même temps j’ai l’impression que déjà c’est trop tard ! (rire)

BF : Non bah… en gros, notre prochain projet, ce serait un film d’animation pour adultes qu’on ferait au Japon et au Canada. Et aussi la troisième partie de notre trilogie, après Amer et L’Étrange couleur, qu’on veut faire. Mais pour l’instant, la priorité ça va être le film d’animation.

HC : L’anime.

BF : Pour adultes.

Ce serait une adaptation, un projet original de votre part… ?

(les deux réalisateurs rient de manière complice)

BF : Tu sais déjà pas mal de choses ! On va pas rentrer trop dans les détails… (rire). Non mais c’était génial. Enfin… On a déjà commencé à aller là-bas, on a justement rencontré les producteurs de Satoshi Kon et c’était… dingue. C’était génial. Bref, voilà ! (rire)

On se réjouit déjà !

 

Entretien conduit et retranscrit par Thomas Gerber et Loïc Valceschini.
Remerciements à Ursula Pfander et à Karine Durance pour avoir permis à cette interview d’avoir lieu.
Portrait: Locarno Festival © Samuel Golay

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